La marque anglaise Auroboros a dévoilé, le 12 juin, quatorze vêtements à arborer sur vos photos publiées sur les réseaux sociaux. La mode virtuelle, une solution contre la fast fashion et le “wear it once”, néfastes à l’environnement et aux êtres sensibles ou nouvelle expression en vogue du culte de l’apparence dans notre société de surconsommation ?
Par Ludmilla Intravaia
Des vêtements virtuels, comme alternative à la mode In Real Life ? Tel est le concept développé par Auroboros qui a lancé, à l’occasion de la London Fashion Week, le 12 juin dernier, sa première collection de prêt-à-porter purement numérique, intitulée Biomimicry. Dédiée, comme son nom l’indique, au biomimétisme consistant à s’inspirer du vivant et de la nature, la collection de la marque anglaise n’a pas été fabriquée dans un atelier de couture mais bien dans des logiciels d’ordinateur, sous la houlette de la designer espagnole Sita Abellan, également DJ et mannequin de son état.
Auroboros commercialise ainsi une garde-robe virtuelle, dont les 14 vêtements et accessoires peuvent être imbriqués, après achat, sur une photo envoyée par le client. Un cliché retouché à utiliser sur les réseaux sociaux pour un de ces posts “outfit of the day”, où l’on arbore une tenue du jour, par exemple.
Auroboros qui se définit comme la “première maison de mode à fusionner la science et la technologie avec la haute couture physique et le prêt-à-porter uniquement numérique” se propose de “faire évoluer l'industrie du luxe vers des dimensions plus profondes, en redéfinissant la façon dont nous imaginons, concevons et avons un effet sur la consommation de vêtements”, le tout dans une perspective “d'innovation, de durabilité et de design immersif”.
Regardez le film de présentation de la collection Biomimicry d’Auroboros, dévoilé lors de la London Fashion Week. La vidéo est interactive et donne directement accès au site DressX, où les vêtements virtuels sont mis en vente, à l’instar du site officiel de la marque.
Pour Auroboros, le lancement de sa collection virtuelle “marque le prochain pas vers la construction d’une garde-robe numérique, à porter pour toutes les occasions, explorant l’innovation durable”. Une vision partagée par le site de vente en ligne de marques virtuelles DressX qui se donne comme mission de “réinventer la consommation de mode multimarque pour un public cherchant à satisfaire (…) un besoin de mode en constant renouvellement pour leurs personnalités en ligne”. Pour en savoir plus, regardez la vidéo de DressX ci-dessous.
A l’heure où, comme le pointait déjà une étude de 2018 de Barclaycard, la filiale carte de crédit de la banque britannique Barclays, “près d'un acheteur anglais sur dix (9 %) admet avoir fait l’acquisition de vêtements, afin de publier des photos sur les réseaux sociaux pour, ensuite, les retourner à l’expéditeur”, la mode virtuelle est avancée comme une solution pour contrer la montée du “wear it once”, fruit du mariage entre les dérives de la fast fashion et le culte de l’apparence favorisé par les médias sociaux. Ce phénomène consistant à n’arborer un vêtement qu’une seule fois, par exemple pour un selfie sur Instagram mais aussi à l’occasion d’un mariage ou de vacances, avant de l’abandonner dans son placard ou de le renvoyer par retour de colis a, en effet, un impact négatif sur l’environnement et les êtres sensibles, par ailleurs fragilisés par le gaspillage de ressources, l’émission de gaz à effet de serre et la pollution d’une industrie de la mode aux pratiques peu vertueuses.
Sur son site internet, DressX explique sa démarche en faveur d’une mode virtuelle plus durable, en ces termes : “Nous croyons fermement que la quantité de vêtements produits aujourd'hui est bien supérieure aux besoins de l'humanité. Nous partageons la beauté et l'excitation que crée la mode physique, mais nous pensons qu'il existe des moyens de produire moins, de produire de manière plus durable et de ne pas produire du tout.” Pour en savoir plus sur les arguments de DressX sur l’éco-responsabilité de la mode virtuelle, regardez sa vidéo ci-dessous.
Et DressX de conclure : “Nous voulons montrer que certains vêtements peuvent exister uniquement dans leur version numérique. N'achetez pas moins, achetez de la mode numérique.” Si les initiatives de mode virtuelle semblent aller dans le sens d’une mode plus éco-responsable et, de même, plus respectueuse des animaux non humains, puisqu’elle n’utilise aucun matériaux issus de leur exploitation, l’injonction de DressX à “ne pas acheter moins” laissera, néanmoins, perplexes les défenseurs d’une consommation plus raisonnée et frugale de la mode, moins axée sur la satisfaction immédiate de désirs narcissiques superfétatoires. D’autant plus qu’un vêtement, aussi virtuel soit-il, est toujours fabriqué avec un coût environnemental pour la planète, ne fût-ce que ceux de l’alimentation et du refroidissement des serveurs informatiques, où ses données sont stockées, ces data centers étant dorénavant dénoncés comme de véritables gouffres énergétiques. En chair et en fringues ou en mode de pixels, le jeu d’un énième post autocentré vaut-il la chandelle de son empreinte carbone ? Telle est la substantifique moelle du problème, dans un monde où la vanité et l’égoïsme humains n’ont d’égal que les défis environnementaux et éthiques à surmonter.
* Les vêtements de la collection virtuelle Biomimicry sont disponibles sur le site internet d’Auroboros, ici et sur le site internet de DressX, là.
* La London Fashion Week printemps-été 2022 s’est déroulée du 12 au 14 juin 2021. Toutes les infos sur sa plateforme online ici.
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