Tout comme Apple avec la Watch, Withings, société spécialisée dans la santé connectée, a jeté son dévolu sur le concept store Colette pour dévoiler sa montre Activité. Une nouvelle illustration de ce rapprochement mode et high tech, "condition sine qua non pour que les objets connectés prennent du sens, au quotidien et dans la durée", a expliqué le designer Pierre Garner au Boudoir numérique.
De quoi parlons-nous ?
La marque : Withings est une entreprise française, spécialisée dans la santé connectée, créée en 2008 et dirigée par deux de ses co-fondateurs, Cédric Hutchings et Eric Carreel
Le produit : montre connectée Activité, disponible dans le concept store parisien Colette, depuis le 25 novembre 2014, puis chez Selfridges et Harrods au Royaume-Uni ou chez Story aux Etats-Unis
Notre interlocuteur : Pierre Garner, designer co-fondateur, en 2002, d’Eliumstudio, le studio de design de la montre Activité
Le boudoir numérique : Pourquoi avoir choisi le concept store parisien Colette pour cette présentation à la presse française d’Activité, la montre connectée de Withings ?
Pierre Garner, designer associé chez Eliumstudio : Ce choix est volontaire pour souligner le positionnement particulier de la montre Activité, dans l’univers des objets connectés. Jusqu’à présent, ils ont surtout été abordés sous l’angle de la technologie. Au mieux, avec une approche consistant à mettre la technologie à la mode, avec toutes les limites inhérentes à cette démarche, où l’objet est plutôt perçu comme une prothèse numérique, génératrice de contraintes. Avec la montre Activité, le regard porté sur l’objet est différent. L’idée est de partir de l’univers de la mode et d’y introduire une couche de technologie, afin de créer un produit évident, facile à porter. En ce sens, Colette apparaissait comme l’endroit idéal pour dévoiler Activité en France. Aux Etats-Unis, la montre a également été présentée à la presse mode.
Un peu comme quand Apple a présenté la Watch, aux journalistes mode, en marge de la Fashion Week, ici, chez Colette, fin septembre dernier ?
Exactement. La technologie s’installe de plus en plus dans tous les domaines de notre quotidien. Elle peut, d’ailleurs, être assez invasive car elle nous accompagne, dorénavant, du matin au soir, avec ces objets à porter sur soi, capteurs de données assez personnelles, de l’ordre de l’intime. Or, qu’y a-t-il a de plus intime et personnel que la mode ? La mode a toujours été, par essence, le reflet de la personnalité de l’individu. Cette convergence de la technologie et de la mode fait donc sens. Ainsi, cette deuxième génération d’objets connectés verra la fusion de la technologie, soit avec l’univers de la mode dans le wearable, soit avec celui de la décoration dans la maison.
Vous avez jeté votre dévolu, pour le bracelet de votre montre, sur les cuirs des Tanneries Haas, une entreprise française collaborant avec des maisons comme Vuitton, Chanel ou Hermès. Est-ce parce que vous avez conçu Activité comme un bel objet que l’on se transmettrait, de génération en génération, à l’instar d’un sac d’une griffe de luxe, par exemple ?
Effectivement, cet aspect patrimonial, de transmission nous intéresse. Nous aurions pu créer une montre au design beaucoup plus fashion ou plus tech. Mais nous avons choisi de demeurer dans l’univers archétypal de la montre. Certes, quand on regarde dans les détails, tout a été redessiné, retravaillé, dans une forme de contemporanéité et d’actualité mais l’impression générale s’ancre dans le monde traditionnel de l’horlogerie. Si nous avons fait appel à des matériaux extrêmement nobles, comme le cuir des Tanneries Haas, c’est parce que, loin de se détériorer avec le temps, ils se patinent et gagnent en valeur sentimentale en vieillissant. La relation affective, intime, se développe avec la vie de l’objet. Pour nous, cela participait, évidemment, de la cohérence du projet de la montre Activité.
En tant que designer, cette relation intime entre l’individu et l’objet, chère à la mode, est donc au cœur de vos préoccupations…
Ce lien sensoriel développé par l’utilisateur avec les objets qui l’entourent, avec les services qui lui sont proposés, nous y attachons une grande importance. La mode est la quintessence même de cette relation affective très forte entre l’individu et un vêtement, un accessoire, un objet ou encore un service. C’est pourquoi cette fusion de la mode et de la technologie s’avère de plus en plus nécessaire, dans le wearable tech. Elle est nécessaire et elle est même la condition sine qua non pour que les objets connectés prennent du sens, dans la vie, au quotidien et dans la durée. Sinon, ils resteront des épiphénomènes. Nous savons très bien nous adresser aux geeks, aux early adopters. Mais, ce qui les intéresse, c’est la nouvelle technologie, pas vraiment la valeur affective de l’objet. Son aspect ne recouvre pas d’importance particulière pour eux. Par contre, dès que l’on veut toucher un panel d’utilisateurs plus large, on est obligé d’aller vers quelque chose porteur de signification. L’erreur étant de considérer la technologie comme une finalité. Alors, qu’elle est un moyen d’atteindre un objectif : dans le cas de la montre Activité, améliorer la santé de l’utilisateur.
* Poursuivez cette réflexion sur la fusion entre mode et high-tech avec cet article "Luxe et technologie" du quotidien Le Soir by Le boudoir numérique.
Ludmilla Intravaia