Demna Gvasalia utilise le deepfake pour son défilé de clones Balenciaga
La maison française Balenciaga a dévoilé, dimanche, la vidéo de sa collection printemps 2022 présentée par le même mannequin, Eliza Douglas, clonée numériquement par le réalisateur Quentin Deronzier.
Par Ludmilla Intravaia
Un défilé de mode virtuel ne fait plus lever le sourcil d’une fashionista depuis belle lurette, tant les outils numériques ont pris la main sur les fashion weeks, depuis le début de la crise de la Covid-19. Du moins, jusqu’à dimanche dernier. Le 6 juin, en effet, Demna Gvasalia, le directeur artistique de Balenciaga, a placé la barre fashion tech un cran plus haut, en dévoilant sa collection prêt-à-porter Spring 22, dont seuls les vêtements et les accessoires ont été fabriqués, In Real Life, dans un atelier.
Le reste, les mannequins, les spectateurs et le catwalk sont générés numériquement par ordinateur. Ils n’ont jamais été là. Jusque là, rien de nouveau, sauf qu’à y regarder de plus près, quelque chose cloche : les 44 personnes qui arpentent le catwalk ont toutes le même visage. Celui de l’artiste Eliza Douglas qui défile régulièrement pour Demna Gvasalia.
Autant de Clones, du nom de cette collection printemps 2022, dont la vidéo de présentation fait appel à de nombreux outils technologiques, dont est friand le directeur artistique de la griffe française. A commencer par le deepfake, une technique de trucage multimédia reposant sur l’intelligence artificielle qui permet de superposer des fichiers audio et vidéo à d’autres, afin, par exemple, de calquer le visage d’une personne sur celui d’une autre ou de reproduire sa voix artificiellement. Pour mieux comprendre cette technologie, regardez cette vidéo de la BBC en 2017, illustrant l’utilisation du deepfake sur des images du président américain Barack Obama.
Certaines silhouettes du défilé sont réalisées par des algorithmes deepfake. Pour d’autres, les traits d’Eliza Douglas, scannés numériquement par photogrammétrie, une technique de mesure permettant de créer des modèles 3D photoréalistes, pour les jeux vidéo notamment, ont été greffés sur ceux d’autres mannequins.
La post-production de ce film du réalisateur français Quentin Deronzier s’appuie également, comme l’indique le communiqué de presse de Balenciaga, sur le “planar tracking, la rotoscopie, le machine learning et le 3D modeling, mis en œuvre pour obtenir un effet hyper-réaliste”. Le tout, afin de mettre en valeur l’intention créative de Demna Gvasalia, telle qu’expliquée dans sa note d’intention : “La présentation du printemps 22 de Balenciaga examine nos perceptions changeantes de la réalité, à travers le prisme de la technologie. Nous voyons notre monde à travers un filtre : amélioré, poli, conformé, photoshopé. Nous ne savons plus discerner le non-édité de l'altéré, l'authentique de la contrefaçon, le tangible du conceptuel, le fait de la fiction, le faux du deepfake. La technologie crée des réalités et des identités alternatives, un monde de clones numériques.”
Quant a la bande son du défilé, d’inspiration SF, elle est signée du musicien BFRND. L’artiste français, habitué des shows de Demna Gvasalia, a fait appel à la synthèse vocale, une technique informatique de génération de signaux sonores, permettant de créer une voix artificielle à partir de textes. Ici, les paroles de la chanson La Vie en rose d’Edith Piaf, récitées d’un ton monocorde par une voix synthétique.
Enfin, autre référence au monde de la tech dans ce défilé deep fake, et aux pirates informatiques cette fois, le Hacker Project dévoile une série d’accessoires et d’articles de maroquinerie qui mixe les codes de la maison française avec ceux de Gucci, en réinterprétant les signatures de la griffe italienne en autant de produits Balenciaga. Ce faisant, le Projet Hacker “explore et questionne les notions d'authenticité, de contrefaçon et d'appropriation au sein de l'industrie de la mode”, livre le communiqué de presse de la marque.
Par exemple, le logo double G de Gucci est remplacé par un sigle double B de Balenciaga sur des sacs monogrammés. Quand ce n’est pas un autre accessoire qui affiche, taggé à la main, “This Is Not a Gucci Bag” (“Ceci n’est pas un sac Gucci”), en hommage à la toile de Réné Magritte, La Trahison des images, en 1929.
Découvrez la collection Clones Spring 2022 de Balenciaga, dans la vidéo ci-dessous.
* Plus d’infos sur la collection Clones Spring 22 sur le site officiel de Balenciaga ici.
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