Revue de presse fashion tech du 29 janvier au 4 février 2022
#3 – Bagues connectées, NFTs, expos et défilé interstellaires, recyclage automatisé, matières innovantes et tables rondes pro… Que s’est-il passé de neuf en fashion tech cette semaine ? Pour tout savoir, écoutez ce podcast du Boudoir Numérique (ou lisez le résumé ci-dessous).
Par Ludmilla Intravaia
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Dans le podcast de la semaine dernière (écouter ici), je vous ai parlé des références tech et SF dans les fashion weeks masculines de Milan et de Paris (plus d’infos dans cet article du Boudoir Numérique). Mais il y avait encore un défilé sur lequel je voulais attirer votre attention, en haute couture cette fois, c’est celui de Pierre Cardin, le 28, au Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget.
Ce musée, c’est le plus grand musée aéronautique de France. On y trouve des avions militaires et civils, de même qu’une galerie consacrée à l’exploration spatiale, avec des fusées, des capsules de rentrée de vaisseaux spatiaux, des combinaisons spatiales, etc. C’est donc dans ce lieu d’exception, tout à fait en phase avec l’histoire de la griffe Cardin, que s’est déroulé le défilé Cosmocorps 3022, un peu plus d’un an après le décès du couturier français.
Quand on s’intéresse à la fashion tech, ce défilé est un must-see, puisque qu’il puise sa force dans les fondations de la mode technologique, à savoir dans la culture française, la mode futuriste des années 60, influencée par l’évolutions des sciences et des techniques, la conquête spatiale et la course à la lune, conquise en 1969. La mode futuriste est celle de créateurs avant-gardistes comme Courrèges, Paco Rabanne et évidemment, dans le cas qui nous occupe, Pierre Cardin.
La signature Pierre Cardin, c’est les robes chasubles, les ensembles zippés à formes géométriques, les bombes de feutre, les chapeaux hublot, les casques transparents, bref tous ces looks de cosmonautes qui ont marqué l’héritage de la griffe, des sources d’inspirations qu’on a retrouvé, façon nouvelle génération interstellaire, dans cette présentation Cosmocorps 3022, dont le titre fait écho au style de la ligne Cosmocorps haute couture printemps-été 1967 de Cardin.
Les mannequins arborant cette collection haute couture printemps-été 2022 ont défilé sous une fusée géante. Le monde est petit, j’ai reconnu, parmi eux, une connaissance du Boudoir Numérique, le mannequin Anaïs Moons qui a prêté ses traits à notre dernier shooting de mode, sous l’objectif du photographe Lionel Samain (retrouvez la série ici).
Les silhouettes de ce défilé n’auraient pas du tout eu l’air incongrues sur le pont de l’USS Enterprise, le vaisseau spatial de Star Trek, ce qui nous ramène toujours à la science fiction comme source d’influence de la mode. A ce propos, pour les fashionistas geek jusqu’au trognon comme moi, j’ai spotté une expo qui se tient jusqu’au 8 avril prochain au Centre des Arts d’Enghien-les-Bains, dans le Val-d’Oise. Elle s’intitule Interstellaire. Je ne l’ai pas encore visitée, mais d’après ce que j’ai vu sur le net, elle dévoile les coulisses, les effets visuels et les costumes d’œuvres incontournables de la science fiction et du fantastique comme les films 2001, L’Odyssée de l’espace, Aliens, Starship Troopers ou encore la série américaine V. Pour ma part, je considère que Diana, le lézard de l’espace le plus flamboyant de la galaxie, a toute sa place sur un catwalk Balmain ou Balenciaga. Ce n’est que mon humble avis mais je le partage.
Puisqu’on parle de série télé, mon entourage se moque souvent de moi, parce que je regarde tout et n’importe quoi à la recherche de pépites fashion tech. Et là, dans le portnawak, j’ai bien donné cette semaine, puisque que j’ai visionné la série And Just Like That…, la suite de Sex and the City. J’ai pleuré des larmes de sang en regardant Carrie, Charlotte et Miranda ressasser leurs peurs de vieillir. Mais il y a un dieu pour les amateurs de fashion tech. En effet, dans l’épisode 8, j’ai quand même été récompensée de mes efforts par un placement de produit fashion tech, une bague connectée Oura que Charlotte demande à son mari de porter, parce que bon, il ne rajeunit pas, ce pauvre Harry.
Oura, c’est un tracker de santé, comme un bracelet de fitness, sauf qu’on le porte au doigt. La mise en avant du produit, dans cet épisode, est franchement bizarre et maladroite, puisque Charlotte s’apprête à faire un câlin buccal à son époux pour qu’il accepte de porter la bague. Toujours est-t-il que si cette Oura Ring est vendue sans faveur sexuelle à la clé, elle semble très appréciée des people comme Kim Kardashian, Gwyneth Paltrow ou encore Jennifer Aniston. Peut-être parce qu’une bague est ressentie comme plus discrète, moins intrusive qu’un bracelet ou une montre. Tenons à l’œil ce type de wearables qui va probablement monter en puissance, à l’avenir.
D’ailleurs, pas plus tard qu’aujourd’hui, je viens de recevoir un communiqué de presse de Circular. Cette start-up française, fondée en 2017, lance les préventes de sa bague intelligente de santé, le 27 février prochain. Présentée au dernier CES, le célèbre salon tech de Las Vegas, début janvier, la bague Circular est, d’après le communiqué de presse de l’entreprise, “dotée de micro-capteurs capables de mesurer plus de 140 métriques, dont des indicateurs clés comme la fréquence cardiaque, le taux d’oxygénation dans le sang, la fréquence respiratoire et la température corporelle”. Les données sont transmises par Bluetooth, en continu, à une application dédiée. Si on précommande cette bague en février, on la reçoit entre avril et juin.
Pour en revenir aux fashion weeks, puisque c’est avec ce sujet que j’ai commencé ce podcast, la fashion week de New York débute le 11 février prochain. A cette occasion la marque Kim Shui a dévoilé, le 1er février, trois clés de jade NFTs, virtuelles donc, mises aux enchères sur la plateforme de jetons non fongibles OpenSea. L’acquéreur d’une clé recevra une robe de la marque et la possibilité d’assister, in real life, au défilé Kim Shui, le 12 février prochain.
Autre marque qui vend des NFT sur la plateforme OpenSea, Ambush. La marque japonaise tease son monde, depuis une semaine, sur son compte Instagram, avec la bague virtuelle POW ! Energon. En forme de bulle de bande dessinée, avec l’onomatopée POW inscrite en son centre, cette bague NFT est inspirée de la ligne de bijoux POW ! d’Ambush qui promettait un “mega drop” en février. Ca tombe bien, on vient d’apprendre, aujourd’hui, qu’il aura lieu le 14 février prochain, le jour de la Saint-Valentin, avec différentes déclinaisons colorées, vert néon, violet scintillant, etc., de la fameuse bague. Cerise sur le gâteau, le bijou fera aussi office de pass VIP qui donnera à son acquéreur un accès privilégié aux NFTs et autres événements d’Ambush. La marque nipponne va également dévoiler son metaverse, à l’occasion de la Milan fashion week féminine. Mais on a le temps, c’est en mars.
En mode durable, je voulais mettre en lumière la création du Cetia, officialisée le 2 février. Le Cetia est nouvelle plateforme d'innovation dédiée au tri et au démantèlement automatisé des textiles et chaussures. C’est une structure commune au Ceti, le Centre européen des textiles innovants et à l’Estia, l’École supérieure des technologies industrielles avancées, une école d’ingénieur. Ce projet circulaire est le fruit des recherches, pendant quatre ans, de la Chaire Bali, le Biarritz Active Lifestyle Industy, un programme d’enseignement et de recherche sur les innovations technologiques à venir dans l’industrie de la mode et du textile. Dans son rapport d’activité 2021, la Chaire Bali explique comment le Cetia se destine “à fournir aux chaînes de recyclage des gisements (textiles, NDLR) de qualité à des prix compétitifs”, en faisant “sauter un verrou technologique majeur pour la filière du recyclage”, à savoir “sa partie amont, le tri et la séparation des différentes parties d’un article de mode”. N’hésitez pas à consulter ce rapport pour en savoir plus sur le Cetia, il est téléchargeable sur le site internet de la Chaire Bali.
En mode éthique, une très bonne nouvelle, le 31 janvier, pour les défenseurs de la cause animale, dont nous sommes : Dolce & Gabbana met fin à son utilisation de la fourrure d’origine animale, dès cette année. Dans son communiqué de presse, la marque italienne explique qu’elle va dorénavant s’orienter vers “l’alternative de la fausse fourrure durable utilisant des matériaux recyclés et recyclables”. Les matières innovantes, en alternative aux matériaux issus de l’exploitation des êtres sensibles et de l’environnement, sont au cœur des préoccupations du Boudoir Numérique. On suivra le dossier de près pour voir si Dolce & Gabbana sera force de propositions stimulantes, dans ce domaine.
Terminons enfin ce podcast par l’événement Texworld Evolution qui se tiendra du 7 au 9 février au Bourget. Les thématiques des conférences ont été dévoilées lundi, à l’instar des noms de leurs intervenants.
J’ai noté notamment, le 7 février, la table ronde intitulée “Déchets alimentaires : ressource phare de la mode de demain ?” qui accueillera Hannes Parth, le CEO de l’entreprise Frumat commercialisant l’alter-cuir de pomme AppleSkin. Cette matière innovante, à base de résidus de pommes provenant de l'industrie italienne du jus de fruits est utilisée, par exemple, par la nouvelle marque de baskets vegan MoEa, lancée au printemps dernier. Je viens juste de publier l’interview de son co-fondateur Achille Gazagnes, cette semaine, sur Le Boudoir Numérique (lire ici).
Cette table ronde donnera aussi la parole à Hannes Schoenegger, le cofondateur de Qwstion, entreprise à qui l’on doit le Bananatex, une autre matière innovante, à base de fibres de bananiers, déjà employée par H&M, dans une ligne de baskets, en mars dernier (plus d’infos dans cet article du Boudoir Numérique).
Autour de cette table s’installera, de même, Charles Reboux de RBX Créations, une équipe spécialisée dans les solutions écologiques innovantes, créatrice de la marque Gorfoo, des vêtements et accessoires éco-responsables en matières durables. RBX Créations est, de plus, à la base du projet Iroony pour le développement de matériaux innovants, du champ au vêtement. En 2020, j’ai fait l’interview, à Avantex, d’Anne Reboux, la co-fondatrice de RBX Créations qui a notamment évoqué ses expérimentations sur le chanvre (retrouvez-la ici).
L’entreprise allemande Wet Green sera également représentée par Thomas Lamparter, son responsable ventes. Wet Green a breveté une méthode qui utilise comme agent de tannage des feuilles d’olive, issues de la production agro-alimentaire, pour tanner son cuir Olivenleder, sans chrome polluant.
Tony Pinville, CEO de l’entreprise d’intelligence artificielle appliquée à la mode Heuritech (lire ici), la chercheuse en e-textile Claire Eliot (lire ici) ou encore Adrien Deslou-Paoli, CEO du bureau d’innovation mode De Rigueur Group (lire ici)… Rien que du beau monde, dans cette programmation que je vous invite à explorer plus avant sur le site internet de Messe Frankfurt, la société organisatrice de l’événement.
Dans la foulée, on n’oublie pas non plus un autre salon incontournable, Première Vision à Paris Nord – Villepinte, du 8 au 10 février. L’événement physique sera doublé d’un digital show du 7 au 11 février.
Voilà, c’est tout pour cette semaine. On se retrouve la semaine prochaine pour la revue de presse fashion tech du Boudoir Numérique. N’hésitez pas à nous laisser vos commentaires, suggestions, infos et autres coups de cœur.
En attendant, comme le dit Monsieur Spock : live long and prosper.